Régulation de l’accès au foncier : les sociétés ne seront plus épargnées
Le marché sociétaire échappe pour l’instant aux deux outils de régulation que sont les sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer) et le contrôle des structures. Une proposition de loi visant à renforcer la régulation de l’accès au foncier agricole au travers de structures sociétaires a été adoptée au Sénat le 3 novembre.
Aujourd’hui en France, les sociétés exploitent près de deux tiers de la surface agricole utile (SAU). Or, constatait le syndicat Jeunes Agriculteurs dans son manifeste récapitulant ses propositions pour une politique de préservation et de régulation du foncier publié en octobre 2020 « la régulation ne s’exerce pas de la même manière sur les personnes physiques et sur les personnes morales ». En effet, le marché sociétaire échappe pour l’instant aux deux outils de régulation que sont les sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer) et le contrôle des structures.
À défaut d’une grande loi foncière agricole pourtant promise par le président de la République Emmanuel Macron, une proposition de loi relative à la régulation de l’accès au foncier agricole au travers de structures sociétaires a été déposée par le député Jean-Bernard Sempastous (LREM) le 9 février 2021. L’objectif principal : préserver un modèle d’exploitation à taille humaine en limitant l’accaparement et la concentration excessive des terres, dans un contexte où la surface moyenne des exploitations françaises a déjà doublé entre 1988 et 2013.
Bataille sur le seuil d’agrandissement significatif
Adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale le 26 mai dernier, le Sénat a ensuite examiné la proposition de loi en commission le 12 octobre proposant des ajustements qui, pour le syndicat Jeunes Agriculteurs, contribuaient à appauvrir l’efficacité du dispositif. Le Sénat proposait notamment de soumettre la prise de participation sociétaire à une autorisation préalable de l’autorité administrative seulement lorsque la superficie totale détenue avant ou après la prise de contrôle excédait quatre fois la surface agricole utile régionale moyenne (SAURM), et non entre une et trois fois la SAURM comme l’avait proposé l’Assemblée nationale.
Par ailleurs, était demandé l’élargissement de l’exemption en cas de cession intrafamiliale jusqu’au quatrième degré inclus (au lieu du troisième degré), ainsi que l’ajout de l’exemption en cas de cessions entre associés ou à des salariés participant à l’exploitation depuis au moins 9 ans. Des amendements que JA était loin d’approuver, le risque étant « d’aboutir à un contrôle d’exception sur une part très mineure du marché », réagissait le syndicat jeune dans un communiqué publié le 2 novembre.
En séance publique le 3 novembre, le Sénat est revenu sur ce « seuil d’agrandissement significatif » qui déclenchera le contrôle préfectoral des cessions de parts, en l’abaissant entre deux et trois fois la SAURM. En revanche, il n’a pas fait machine arrière sur les autres points soulevés par JA.
La proposition de loi doit désormais être discutée en commission mixte paritaire, probablement début décembre.
Les grands enjeux concernant le foncier auront une nouvelle fois l’occasion d’être rappelés et débattus lors de la semaine du foncier qui aura lieu du 22 au 26 novembre avec pour thématique générale « La terre agricole, en quoi ça te concerne ? ».