La méthanisation, le nouveau défi de Florian Bonal
Originaire de Monsac dans le département de la Dordogne, Florian Bonal, 24 ans, est éleveur de race limousine en production de broutards. Il est sur le point de finaliser l’installation d’un méthaniseur en cette fin d’année 2023.
En Gaec avec son grand-frère et son père, Florian s’est installé en 2021 dans l’exploitation familiale qui compte 307 hectares et est dédiée à la polyculture élevage, avec pas moins de 150 mères de race limousine en production de broutards. Sa ferme a cette particularité de présenter une partie de sa surface en bio et une autre en conventionnel, le tout travaillé en agriculture de conservation des sols.
Après l’obtention de son BTS Analyse, conduite et stratégie de l’entreprise (Acse), le jeune éleveur a décidé de prendre son sac et de partir séjourner au Canada. Les quatre mois passés au pays du sirop d’érable lui ont permis d’acquérir de solides connaissances sur la conduite d’une exploitation céréalière. « Le but de ce voyage était de me bâtir une expérience, découvrir de nouvelles pratiques, des modèles différents de ceux que l’on peut retrouver en France. »
Un séjour au Canada bénéfique
Florian recommande vivement de vivre une expérience en dehors des sentiers battus :
« Il me semble très important avant de s’installer, de partir voir d’autres pratiques et exploitations et ainsi de se forger des bases solides. Souvent, nous restons dans notre région, sans aller voir ce qui se fait ailleurs alors que ces voyages peuvent nous aider à générer des idées nouvelles qui nous permettront ensuite d’innover sur la ferme familiale ou celle que nous reprenons. Ça ne peut être que positif ! »
Dès son retour en France, le jeune monsacois décide de faire le tour des Cuma, coopératives qui mutualisent les matériels agricoles.
La méthanisation, un projet à plusieurs défis !
Florian y découvre la méthanisation. Attiré par ce type de projet, il décide d’en parler à son père et son frère. « Je me suis dit que ce serait bien d’investir dans un méthaniseur en semant en parallèle des cultures intermédiaires à vocation énergétique (Cive), à raison de trois cultures sur deux ans, sans réduire la production céréalière destinée à l’alimentation du bétail », raconte Florian. Les Bonal ont muri ce projet en famille, en consultant à maintes reprises différentes Cuma locales. En parallèle, Florian a multiplié les visites dans la région en quête d’informations, en échangeant en particulier avec des agriculteurs qui commercialisent leurs digestats.
Le financement : un parcours du combattant
Une fois l’étude approfondie terminée, Florian est parti à la recherche d’investisseurs. « D’abord à travers un appel à réseau, des anciennes connaissances, évoluant pour la plupart dans la région ; dans un périmètre de dix kilomètres autour de l’exploitation », explique le jeune agriculteur. Mais pourquoi un périmètre si précis ? « Pour un meilleur raccordement sur le réseau de distribution. Étant donné qu’il faut l’apport de fournisseurs pour avoir les rudiments qui vont alimenter le méthaniseur ». La démarche s’avère payante. « Nous avons obtenu, un peu plus d’un million d’euros de subvention grâce à un dossier déposé à l’Agence de la transition écologique (Ademe) et la région ; sur un projet d’une valeur de sept-millions d’euros », indique Florian.
À la sortie du Covid pourtant, les banques étaient plutôt frileuses à tout financement, mais Florian a réussi à obtenir un accord en août 2022. Les chantiers d’installation ont débuté sur l’exploitation en septembre de la même année. Les canalisations de gaz ont été posées en début d’année 2023, et les travaux s’achèveront à la fin de l’année.
Un projet qui mise sur la communication et le local
Florian et ses collaborateurs ont misé sur la communication, afin « d’impliquer la population locale dans le projet et leur expliquer nos objectifs. » Ils ont, auparavant, prévenu le maire et le conseil d’administration du village. « L’atelier de méthanisation, note Florian, servira aussi à dynamiser l’économie locale. » L’agriculteur entrepreneur compte bien créer des emplois pour gérer la logistique et assurer le bon fonctionnement du site.
Prochaine étape : une station de Bio GNV* !
Confiant du succès qu’aura son projet, le JA ambitionne, après le démarrage du méthaniseur d’installer une station de Bio GNV pour bus et camion. Le Compressed Natural Gas abrégé CNV est composé à 97 % de méthane (source Ademe).
* GNV est le nom que l’on attribue au gaz naturel lorsqu’il est utilisé pour la mobilité.
Le fonctionnement technique du méthaniseur
« Le bon fonctionnement du méthaniseur dépend surtout de ce que l’on met à l’intérieur ! Le dispositif démarre après incorporation de la matière, sous l’effet de la trémie, celle-ci est broyée. La matière est brassée en continu dans un milieu anaérobie (sans oxygène) pour une bonne dégradation de la matière organique par les bactéries. La température ambiante à l’intérieur du digestat est de 40 ° Celsius. C’est à ce stade qu’est produit le biogaz qui sera par la suite épuré pour être injecté dans un réseau de distribution appelé biométhane (méthane renouvelable d’origine biologique) », précise Florian. Son méthaniseur produira un gaz 100 % renouvelable issu principalement de déchets de l’industrie agroalimentaire. « Le tout sera injecté dans le réseau de distribution pour alimenter des foyers et des usines se trouvant à une distance maximale de 100 kilomètres. »
Les résultants de la méthanisation
Florian projette d’échanger le digestat obtenu en sortie de méthanisation avec d’autres agriculteurs locaux. « Une partie du digestat liquide et solide sera échangée avec certains investisseurs du projet. Une autre partie du digestat liquide sera apportée aux acteurs qui amèneront des cultures intermédiaires à vocation énergétique (Cive). Et pour ceux qui utilisent les fumiers, ils auront principalement du digestat solide et un peu de digestat liquide. La totalité du gaz sera vendue à Gaz Bordeaux. Il partira directement dans leur réseau de distribution qui se situe sur les communes de Bayac, Landes et Beaumontois-en-Périgord. » En plus d’un prix garanti sur le gaz vendu, Florian a déjà signé un contrat d’achat du gaz sur 15 ans. « Cela permettra de sécuriser les investissements sur cette durée et cela m’aidera à rémunérer les importations des matières récupérées. »
« C’est toujours intéressant d’échanger avec ses paires, d’où la nécessité d’intégrer JA », résume Florian. Pour lui, c’était une évidence de faire son installation par le biais du syndicat. « J’ai toujours côtoyé des JA, c’est une grande famille, cela permet de se retrouver tous ensemble et de partager des moments conviviaux, et aussi apprendre de nouvelles façons de faire et de communiquer. »