Sur le terrain

UH 2024 : cap sur les élections chambres d’agriculture !

L’Université d’Hiver de Jeunes Agriculteurs, tenue cette année à Montignac-Lascaux (Dordogne) du 3 au 5 décembre, a été le point d’orgue d’une mobilisation nationale des réseaux JA et FNSEA. Avec un objectif clair : gagner les élections des chambres d’agriculture de janvier.

L’Université d’Hiver 2024 de Jeunes Agriculteurs à Montignac-Lascaux (Dordogne).

« Gagner les élections, c’est gouverner les chambres d’agriculture. » Cette phrase prononcée par Quentin Le Guilloux, secrétaire général de Jeunes Agriculteurs, résume l’ambition des responsables syndicaux réunis à l’occasion de leur Université d’Hiver à Montignac-Lascaux en Dordogne. Cet événement national qui a lieu chaque année en décembre permet au réseau de réfléchir à comment améliorer son fonctionnement et d’ébaucher les futures grandes orientations du syndicat.

Un contexte difficile, mais un réseau déterminé

Quentin Le Guilloux lors de son allocution au meeting des élections chambres d'agriculture.

Dans son discours d’introduction, Quentin Le Guilloux n’a pas éludé les difficultés du moment : recomposition politique en cours, l’épée de Damoclès d’une possible motion de censure (lorsqu’il a pris la parole, celle-ci n’avait pas encore été votée), accord du Mercosur et les impacts de la guerre en Ukraine. « L’ambiance est lourde, parfois étouffante, mais je vois un réseau déterminé, qui fait preuve d’adversité et d’exemplarité », a-t-il déclaré. Dans un contexte général très incertain, l’Université d’Hiver n’a pas dérogé à sa mission première, être un espace de réflexion, de débats et de préparation pour affronter les défis actuels et futurs. Les élections des chambres d’agriculture, cruciales pour le syndicat, ont dominé les échanges. « Faire voter est une priorité absolue ! », a martelé le secrétaire général, appelant à lutter contre le fléau de l’abstentionnisme qui gangrène.

Préparer l’avant et l’après élection

Cette édition a été pensée comme une « classe préparatoire » des élections chambres, avec au programme plusieurs ateliers pratiques pour outiller les responsables syndicaux : atelier « écrire un discours percutant », pour mieux inspirer et convaincre. Atelier « techniques de lobbying », afin d’influencer efficacement les décisions locales et nationales. Des stratégies concrètes pour bien commencer « les 100 premiers jours à la chambre » dans le cas où elle est gagnée et dans le cas contraire. « La campagne pour ces élections est très prenante, mais nous devons aussi nous préparer à l’après-élection », a ainsi prévenu le SG national

Un meeting JA-FNSEA pour lancer la campagne électorale

Pierrick Horel, président JA, lors de son allocution au meeting des élections chambres d'agriculture.

Un meeting syndical a été organisé à la fin du deuxième jour de l’UH, réunissant plus de 500 responsables issus des réseaux JA et FNSEA dans une même salle. Véritable point d’orgue de l’Université d’Hiver, celui-ci est monté encore plus en intensité, car au même moment se votait la motion de censure à l’Assemblée. « Ça y est, nous sommes officiellement dans la course aux élections des chambres d’agriculture », a déclaré Pierrick Horel, président de Jeunes Agriculteurs, soulignant l’entrée dans une phase cruciale pour le réseau. « On vit des crises climatiques, économiques, politiques, géopolitiques, … c’est vertigineux. Mais cela montre à nouveau la force du syndicalisme majoritaire, nous ne laisserons pas les paysans seuls sur le bord du chemin », a-t-il ajouté. Cette concordance inédite, entre UH et vote de la motion, aura permis aux présidents des deux structures de communiquer instantanément les priorités.  « Aujourd’hui, tout vacille, mais nous sommes convaincus que seuls nos syndicats peuvent maintenir le cap », a affirmé Arnaud Rousseau, président de la FNSEA qui en a profité pour appeler les réseaux à aller à la rencontre de tous les députés pour préparer la suite dès qu’un nouveau gouvernement sera constitué Il a également insisté sur l’importance de tenir les engagements pris envers les agriculteurs, « aller chercher les promesses qui nous ont été faites, coûte que coûte, c’est notre rôle. »

« Faire voter est une priorité absolue ! » - Quentin Le Guilloux, secrétaire général de Jeunes Agriculteurs.

Priorité au faire voter

Quentin Le Guilloux a invité le réseau à se tenir loin des discours populistes et des provocations : « Ayez confiance en nous, comme nous avons confiance en vous. Soyons fiers de ce que nous portons. »

L’Université d’Hiver a été rythmé par de nombreux ateliers riches en échanges, axés sur des enjeux stratégiques et très pratiques en vue de renforcer le réseau JA dans la perspective des élections chambres d’agriculture.

« Le faire voter – Mode d’emploi »

Cette séquence en plénière a souligné l’importance des élections chambres et les stratégies à mettre en œuvre pour inciter au vote. Après une présentation des enjeux par Simon Martin, secrétaire général adjoint, les discussions ont permis de partager les différentes approches adoptées par les départements. Les appels téléphoniques, permis grâce à la récupération des listes en préfecture, est une stratégie reconnue comme étant très efficace. Les rencontres cantonales et les initiatives locales comme le porte-à-porte ou l’organisation des assemblées générales sont également des leviers privilégiés. En Auvergne-Rhône-Alpes ou à Mayotte, la sensibilisation est renforcée par la nomination de référents locaux, qui préparent des meetings dès janvier. L’idée originale des soirées « apéro-pizza » a été évoquée comme moyen convivial pour encourager le vote électronique, en créant un cadre attractif et convivial. Cependant, des défis importants ont été soulevés, comme le problème des enveloppes non reçues en Guadeloupe.

Atelier « les 100 premiers jours à la chambre »

Retour d'expérience à la chambre d’agriculture de  Mélanie Soulas-Barrault (JA 36) et Maxime Buizard Blondeau (JA 45).

Une table-ronde a été organisée en présence de Mélanie Soulas-Barrault (JA 36) et Maxime Buizard Blondeau (JA 45) venus partager leur expérience à la chambre d’agriculture. Une séquence qui a permis de partager des conseils précieux sur la manière d’instaurer une dynamique positive dès le début : inclure tous les acteurs dès les premières semaines pour poser les bases d’une gouvernance inclusive. Adapter ses priorités aux réalités locales, en tenant compte des défis spécifiques à chaque département. Planifier des actions concrètes dès les 100 premiers jours pour donner de la crédibilité au mandat et mobiliser durablement.

Atelier « écrire mon discours »

Cet atelier a permis aux participants de plonger dans les coulisses de l’écriture d’un discours impactant. En guise d’exercice pratique, le fameux discours de François Hollande « Moi président » a été analysé, sur le fond et la forme, pour en dégager les éléments clés qui rendent un message percutant et compréhensible.

Les sept clés d’un discours réussi

Les animateurs ont mis en lumière sept principes essentiels pour rédiger un discours efficace :

  1. Clarté du message : aller à l’essentiel pour que l’auditoire retienne les idées principales.
  2. Structure logique : construire une progression claire pour guider l’écoute.
  3. Style adapté : s’adresser à son public avec le ton et le vocabulaire appropriés.
  4. Authenticité : faire ressentir des émotions sincères pour établir une connexion.
  5. Appel à l’action : toujours inclure un message mobilisateur.
  6. Illustration : utiliser des exemples concrets pour rendre le propos vivant.
  7. Répétition stratégique : marteler les idées fortes pour marquer les esprits.

Un débat animé a surgi lors de la séance : faut-il improviser un discours ou toujours le préparer ? Les participants ont échangé sur l’équilibre à trouver entre spontanéité et rigueur, en fonction des contextes et des objectifs. Pour mettre ces enseignements en pratique, chaque groupe a été invité à rédiger et présenter un discours sur un thème donné. Un exercice qui a permis de tester les techniques abordées et de travailler la prise de parole en public. Cet atelier a offert aux participants des outils concrets pour captiver leur auditoire et transmettre ses idées.

RO 2024 sous le signe de la coopération et du mutualisme agricole

L’Université d’Hiver marque une étape clé dans la réflexion collective autour du Rapport d’Orientation 2024, qui a pour thème « Coopération et mutualisme agricole » et qui sera débattu en juin prochain. Porté cette année par les élus Romain Deleris (JA Aveyron), Stéphanie Lebègue (JA Ardennes), tous deux membres du Conseil d’administration national et Vincent Ferry (JA Côte-d'Or), membre du bureau national, le travail vise à redéfinir les rôles et ambitions des modèles coopératifs dans un contexte agricole en pleine mutation. « Il est temps de repenser ces modèles que nous avons hérités pour mieux répondre aux besoins des jeunes installés », souligne Romain Deleris.

Un modèle en quête de renouveau

La thématique du mutualisme n’est pas nouvelle à JA, mais elle prend une résonance particulière face aux changements qui s’opèrent. « Le rôle des coopératives évolue avec les nouvelles attentes sociétales et économiques. Nous devons réfléchir à des modèles qui garantissent que les coopératives restent au service des agriculteurs et ne deviennent pas des acteurs qui se substituent à eux », explique Vincent Ferry. Cette réflexion s’inscrit dans la continuité du Rapport d’Orientation de 2013 sur la gouvernance des coopératives, mais avec une ambition élargie : repenser la place des agriculteurs dans une vision commune et modernisée du mutualisme.

De gauche à droite : Adama Séne (plume du Rapport d’Orientation), Vincent Ferry, Stéphanie Lebègue et Romain Deleris (rapporteurs).
De gauche à droite : Adama Séne (plume du Rapport d’Orientation), Vincent Ferry, Stéphanie Lebègue et Romain Deleris (rapporteurs).

Des outils à revaloriser

Alors que les coopératives devraient être des leviers pour sortir de la crise, certains événements récents, comme la prestation intégrale proposée par InVivo cet été, suscitent des interrogations au sein du réseau. « Ces structures, initialement conçues pour nous aider, ne doivent pas prendre la place des exploitants agricoles. Il est essentiel de redéfinir leur rôle », insiste Stéphanie Lebègue.

Une démarche participative et ambitieuse

Les discussions se poursuivront en février, lors de la traditionnelle tournée des régions, afin d’intégrer les contributions locales et ainsi affiner le texte avant sa dernière mouture. « Nous avons besoin d’une vision commune et d’une ligne politique claire pour aborder ces défis », résume Romain Deleris, rappelant l’importance de l’implication du réseau dans la construction de ce rapport.

En réinterrogeant le mutualisme agricole, les Jeunes Agriculteurs ambitionnent de moderniser ses outils historiques pour qu’ils répondent mieux aux attentes des exploitants d’aujourd’hui. Ce rapport sera présenté et débattu lors du 58ème congrès syndical qui se tiendra les 3, 4 et 5 juin 2025 dans le Gers. Ancré dans les réalités du terrain et nourri par une réflexion collective, il servira de boussole pour guider les futures actions du réseau.

À Montignac-Lascaux, au cœur d’une région d’excellence agricole, les Jeunes Agriculteurs ont montré leur capacité à fédérer et à agir face aux défis de l’époque. Avec les élections chambres en ligne de mire, le réseau JA entend valoriser et défendre une agriculture innovante, durable et ancrée dans la réalité de ses territoires.