Politique et société

Élections chambres : un débat inédit a mis aux prises JA, CR, Conf’ et FNSEA

La chaîne LCP a réuni, lundi 13 janvier, les représentants syndicaux du monde agricole pour débattre dans le cadre des élections des chambres d’agriculture. Pendant près d’une heure et demie, Jeunes Agriculteurs, Coordination Rurale, Confédération Paysanne, et FNSEA ont confronté leurs divergences et partagé leurs ambitions pour l’avenir de l’agriculture française.

Le débat s'est tenu le 13 janvier sur LCP. (c)LCP

« La colère est vive, le ras-le-bol est là. Le monde agricole va mal et c’est dans ce contexte de crise qu’il va choisir ses représentants. » C’est avec ces mots que Myriam Encaoua, journaliste de La chaîne parlementaire (LCP), a donné le ton de ce rendez-vous télévisuel inédit. En effet, pour la première fois dans l’histoire des élections des chambres d’agriculture, quatre leaders syndicaux se sont affrontés lors d’un débat, et qui plus est, à une heure de grande écoute. Chacun disposait d’un temps de parole égal, comme dans toute élection démocratique, invité à s’exprimer sur les enjeux majeurs du secteur agricole.

Ce grand débat s’est déroulé le même jour que la rencontre des syndicats avec le Premier ministre François Bayrou, et l’avant-veille du début du scrutin, prévu le 15 janvier.

Retour sur la rencontre avec le Premier ministre

Les syndicats ont d’abord évoqué leur entretien avec le Premier ministre un peu plus tôt dans la matinée. « Nous n’avons pas entendu grand-chose de nature à répondre aux difficultés profondes et aux aspirations du monde agricole », a fait remarquer Laurence Marandola, porte-parole de la Confédération Paysanne.
De son côté, Valérie le Floc’h, présidente de la Coordination Rurale, a estimé que François Bayrou était « apparu comme éloigné des réalités du terrain ». Elle a toutefois souligné que ce dernier s’était engagé à œuvrer « vers un alignement de la réglementation européenne et un arrêt des surtranspositions ».
Pour Pierrick Horel, président de Jeunes Agriculteurs, « le Premier ministre s’est montré à l’écoute. Nous avons pu lui rappeler le calendrier qui est le nôtre sur la Loi d’orientation agricole. »

La discorde du mode de scrutin

Si les échanges se sont déroulés de bout en bout de façon très cordiale, le débat s’est quelque peu tendu à l’évocation du mode de scrutin des élections. « De toute évidence ce scrutin n’est pas démocratique », a pointé la porte-parole de la Confédération Paysanne jugeant la clé de répartition des sièges non représentative. « Je suis d'accord pour que l’on débatte du mode de scrutin à chaque élection. Cependant, ce qui nous importe aujourd’hui, c'est de connaître le projet pour les agriculteurs. Le mode de scrutin est un autre sujet qui doit être abordé avec les autorités publiques avant les élections », lui a répondu Pierrick Horel, soulignant que « le vote est représentatif de ce qu’est l’agriculture sur le territoire. »

« Pour nous le Mercosur c’est non ! »

Sur la question des accords de libre-échange, « JA et FNSEA étaient favorables à ce Mercosur avec des aménagements », a attaqué Véronique Le Floc’h. Arnaud Rousseau, président de la FNSEA, a rappelé avec fermeté la position de JA et de la FNSEA depuis le début : « Il suffit de lire et d’écouter ce que nous disons depuis des mois. Pour nous le Mercosur c’est non ! Non, car il n’y a pas de traçabilité, non car nous importons des produits avec des matières actives qui sont interdites en Europe. »

Le revenu, l’enjeu numéro un

Depuis plus d’un an, les agriculteurs revendiquent avec force leur volonté de vivre dignement de leur travail. À partir de ce constat, chacun a présenté sa vision des prix planchers. La Confédération paysanne plaide pour sa part en faveur de « prix rémunérateurs minimums garantis ».  La Coordination Rurale se dit favorable aux prix planchers. Une position qui n’est pas partagée par Jeunes Agriculteurs et la FNSEA. « Nous sommes contre. En tant que jeunes agriculteurs, nous ne voulons pas nous contenter de gagner un Smic ou deux. Nous voulons percevoir la juste valeur de notre travail et de notre engagement », a expliqué Pierrick Horel. « On voit bien que les prix planchers ne fonctionnent pas. Soit les prix autour de nous sont plus bas et tout le monde achète ailleurs, soit le prix est plus élevé et cela devient un prix plafond », a complété Arnaud Rousseau. Tous se sont néanmoins accordés sur le fait que le combat pour une meilleure rémunération, s’il n’était pas gagné, n’était pas perdu pour autant.

L’épineuse question de l’Ukraine a également été abordée : pour ou contre son intégration dans l’Union européenne ? Les quatre syndicats ont une nouvelle fois marqué leurs désaccords. JA et la FNSEA réclament d’abord de savoir qui paiera son entrée et demandent à ce qu’une équité de traitement soit appliquée ; la Coordination Rurale dénonce quant à elle une concurrence déloyale, tandis que la Confédération Paysanne a fait le choix de ne pas se positionner sur cette question.
Sur l’écologie, Arnaud Rousseau a rappelé la doctrine « pas de transition sans solution ». Sujet ô combien essentiel pour la société d’une manière générale et en particulier en agriculture, on peut s’étonner qu’il ait été si peu évoqué au cours des débats.

Le dernier thème portait sur l’agriculture de demain. Pierrick Horel a donné la vision de Jeunes Agriculteurs : « Pour commencer, il y a la question du revenu. Sans ça, nous ne donnerons envie à personne de s’installer. Ensuite il faut un meilleur accompagnement des projets à l’installation, mais aussi de la simplification. »

Le président JA a souhaité conclure ce débat sur une note positive : « Je voudrais avoir un message d’espoir pour les jeunes de tous les profils qui veulent rejoindre l’agriculture. Je veux leur dire qu’il y a de vraies perspectives dans ce métier qui fait sens. »

Ces dernières années, l’agriculture a été remise sur le devant de la scène du fait du Covid, de la guerre en Ukraine et des mobilisations agricoles. À ce titre, un taux de participation plus élevé est anticipé. Réponse début février.