« Le gros enjeu maintenant est de faire en sorte que mon projet soit viable. »

En 2019, fraîchement diplômée d’un master en cybersécurité, Amony Phily, 28 ans, a tourné le dos à son orientation première pour devenir éleveuse de chèvres de race alpine dans la Nièvre avec un atelier de transformation pour produire des crottins de Chavignol. Au-delà du métier d’agricultrice, elle aspirait surtout à un autre mode de vie. « Je viens de la région parisienne, et ce mode de vie ne me correspondait plus du tout », témoigne Amony. La jeune femme a été en quelque sorte précurseure du ras-le-bol citadin qui a touché une partie de la France quelques mois plus tard, après le premier confinement lié à la pandémie de Covid-19. Si la pandémie a conforté son choix de vie, elle n’a en revanche pas facilité son installation. « J’ai eu la difficulté de devoir me former pendant le confinement, et ça, c’était un peu galère », atteste l’agricultrice.

Partie tenter sa chance dans la Nièvre, où habite une partie de sa famille, elle s’est d’abord rapprochée de Pôle Emploi avant de frapper à la porte de la chambre d’agriculture départementale qui est restée son point de repère tout au long de son parcours à l’installation. La jeune femme, qui ne souhaitait pas retourner sur les bancs de l’école et suivre un BPREA, a pu bénéficier de nombreuses formations ciblées sur son projet, dans le cadre d’un plan de professionnalisation personnalisé (PPP) proposé par la chambre d’agriculture. « Élevage caprin, transformation fromagère, comptabilité… » liste l’agricultrice qui a conçu sa formation de sorte à être au plus près de ses besoins. Elle a également eu la possibilité de faire des stages encadrés par Pôle Emploi, qu’elle a effectués chez des voisins éleveurs. « Avec les voisins, ça se passe très bien, et heureusement ils ne me voient pas comme une concurrente ! » indique l’éleveuse avec soulagement. Le passage à la Safer a aussi été une étape incontournable de son parcours à l’installation, pour acquérir du foncier.

Après ce long périple, elle a fini par s’installer en 2022 sur 18 hectares. Les premiers mois ont été consacrés au dépôt des permis de construire et à la construction des bâtiments, ce qui a pris un certain temps. Les 90 chevrettes qui constitueront son troupeau n’arrivent que maintenant sur son exploitation, et Amony espère commencer la production laitière et la fabrication de ses premiers crottins de Chavignol l’année prochaine. « Le gros enjeu maintenant est de faire en sorte que mon projet soit viable pour arriver à rembourser tout ce que j’ai emprunté », indique l’éleveuse, lucide. Elle a pu obtenir sans trop de difficultés un prêt bancaire du Crédit Agricole, ainsi qu’un prêt d’honneur de la part du réseau Initiative France, qu’elle considère comme « la cerise sur le gâteau ». Le prêt d’honneur Initiative France est un prêt à taux zéro sans garantie demandée. Par ailleurs, en plus de soutenir financièrement le porteur de projet, le réseau Initiative France propose de l’accompagner durant les cinq premières années de son installation. 

Si la banque a été plutôt coopérante avec Amony vis-à-vis de sa demande d’emprunt, c’est notamment grâce à l’étude de marché réalisée par la chambre d’agriculture ainsi qu’à l’élaboration d’un plan d’entreprise (PE) en béton attestant de la viabilité de son projet. D’après l’éleveuse, les nombreux interlocuteurs qui l’ont accompagnée tout au long de son parcours à l’installation ont largement contribué à l’aboutissement de son projet. Qu’il s’agisse de Pôle Emploi, de la chambre d’agriculture, de la Safer, du Réseau Initiative France, de son assureur ou d’autres, elle a su saisir toutes les opportunités pour multiplier ses chances de réussite.