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Blé d'hiver : étaler les semis pour écarter les risques

Retarder la date de semis de ses blés, les avancer ou ne rien changer ? La question se pose pour diverses raisons. Un compromis entre risques climatiques, contrôle des mauvaises herbes, présence des pucerons et potentiel de rendement, est à trouver.

Champ de blé

À l’heure où bon nombre d’habitudes dans la façon de cultiver les céréales, sont remises en cause, il est tout à fait légitime de se poser aussi la question de la date de semis. Faut-il semer plus tôt les blés pour qu’ils soient bien développés avant l’hiver et arrivent à un stade bien avancé en juin, avant les fortes chaleurs et les risques d’échaudage ? Faut-il, au contraire, retarder les semis pour écarter les risques de transmission de viroses par les pucerons à l’automne et réduire la pression des adventices, notamment des graminées ? Ou faut-il rester dans les dates classiques de semis, et ainsi, éviter les risques de gel d’épis au printemps et ne pas pénaliser le rendement ?

« Le changement climatique se manifeste par une augmentation globale des températures, mais aussi par des événements climatiques exceptionnels, de plus en plus fréquents, qui peuvent intervenir de façon aléatoire tout au long du cycle des cultures », reconnaît Arvalis, l’Institut du végétal. Pour éviter ce type de risque, cet organisme à vocation technique estime qu’il ne faudrait pas mettre « tous ses œufs dans le même panier », mais plutôt faire en sorte que les parcelles d’une même exploitation n’arrivent pas toutes en même temps au même stade. « L’objectif est de limiter le nombre de parcelles exposées à un stress climatique ponctuel qui interviendrait à une date donnée », indique Arvalis.

Échapper au gel de printemps

Les variétés ont aussi des comportements différents. Pour limiter les risques de gel, d’échaudage ou de stress hydrique, il faut trouver la bonne combinaison « précocité - date de semis ». À cette fin, il est important de tenir compte de la précocité des variétés, à la fois à montaison, et à épiaison. « Les variétés précoces à montaison comme Descartes ou Cellule, ne doivent pas être semées trop tôt pour éviter les risques de gel d’épis en début de montaison comme on l’a vu en 2012 », prévient Arvalis. Elles sont souvent peu photosensibles, et se développent même lorsque les jours sont encore courts. « En cas de semis précoces, le choix d’une variété de blé tardives à montaison, souvent très photosensibles, est essentiel », ajoute l’institut.

Éviter les conditions échaudantes

« Une variété tardive à l’épiaison, donc à cycle long, permet d’accéder à des potentiels de rendement plus élevés, par l’allongement de son cycle, remarque également Arvalis. Ce choix est judicieux en sols profonds et sous des climats plus tempérés. En milieux difficiles, la précocité à épiaison contribue à éviter les conditions échaudantes de fin de cycle. Dans les régions à sols superficiels ou sous les climats du sud de l’Hexagone, le choix de variétés précoces à épiaison est incontournable ». Pour les mêmes raisons, il est déconseillé de semer tard une variété à cycle long, car elle arriverait très tard à épiaison et serait davantage sujette aux risques d'échaudage en juin.

Attention au risque de stérilité 

Autre phénomène susceptible de se produire, la stérilité du pollen. Les températures froides au moment du gonflement du blé, entre avril et mai selon les régions, les années et les variétés, peuvent perturber la méiose (division cellulaire) et entrainer des problèmes de stérilité de pollen. Pour limiter les aléas liés au climat, quelle que soit la région, il est conseillé d’implanter plusieurs variétés sur son exploitation, et en particulier des variétés avec des rythmes de développement différents. Les années se suivent, mais ne se ressemblent pas.

Réduire la pression des mauvaises herbes

Arvalis conseille également de repousser la date de semis du blé dans les parcelles les plus infestées d’adventices et notamment de ray-grass et vulpins. En Bourgogne par exemple, un décalage du semis de 15 à 20 jours en octobre, réduit en moyenne de 60 % les populations de vulpins et de 50 %, celles de ray-grass. Un décalage de 20 à 30 jours fin octobre – début novembre permet de gagner en moyenne 80 % d’efficacité contre les vulpins et 90 % contre les ray-grass. Un décalage encore plus tardif permet de réduire de plus de 95 % les populations de graminées adventices. Cette décision peut présenter des inconvénients. Plus on attend pour semer, plus les conditions deviennent difficiles. Le potentiel de rendement risque aussi d’être pénalisé.

« C’est plutôt vrai en parcelles propres, reconnaît Arvalis, mais en parcelles sales, rien de moins sûr ». Les infestations de graminées en semis précoces pénalisent aussi le rendement, et les dépenses supplémentaires en herbicides ont un impact sur la marge brute. « Il ne s’agit pas de généraliser cette pratique, précise Arvalis. Mais de la réserver aux parcelles les plus historiquement infestées en vulpins ou ray-grass, en particulier en rotation de cultures d’hiver ». Retarder la date de semis, permet aussi de réduire le risque d’infestation par des pucerons et cicadelles à l’automne ainsi que de limiter la contamination du blé par le piétin-verse et le piétin-échaudage.