Les acteurs du monde agricole se mobilisent contre le mal-être des agriculteurs
Mercredi 30 juin, les acteurs du monde agricole ont présenté les propositions qu’ils formuleront au gouvernement dans le cadre du futur plan interministériel sur l’identification et l’accompagnement des populations agricoles en difficulté et la prévention du suicide.
Des représentants de Jeunes Agriculteurs, de la FNSEA, des chambres d’agriculture et de la MSA étaient présents aux côtés d’Olivier Damaisin, député LREM du Lot-et-Garonne en charge du rapport sur le mal-être des agriculteurs remis au Premier ministre le 1er décembre 2020.
La fin de carrière, une période à risque
« Il y a 30 % de suicides supplémentaires dans la profession agricole par rapport aux autres professions », a rappelé la présidente de la FNSEA Christiane Lambert. Par ailleurs, « 60 % des agriculteurs qui se suicident ont entre 55 et 70 ans », a-t-elle ajouté. Le moment du départ à la retraite semblant être une période particulièrement à risque, le sujet de la transmission n’en devient que plus crucial. Suite à ce constat, les organisations proposent la mise en place d’un dispositif « passage de relai », qui consisterait en une aide financière annuelle des 57 ans aux 62 ans de l’agriculteur, conditionnée à l’installation aidée d’un jeune. Selon Julien Rouger, membre du conseil d’administration chez JA nat’, cette aide serait de 12 000 euros par an soit 1 000 euros par mois. L’élu JA a également souligné l’importance de développer le tutorat et le mentorat pour suivre le jeune tout au long de sa carrière, et pas seulement au moment de son installation. « On travaille avec notre réseau pour construire l’accompagnement de demain » a-t-il précisé, en ayant à l’esprit la réforme de l’AITA (Accompagnement à l’installation et la transmission en agriculture) au 1er janvier 2023.
Harmoniser les actions
Jusqu’à présent, le nom des dispositifs d’accompagnement des chambres d’agriculture variait d’un département à un autre, « nuisant probablement à notre visibilité », selon leur président Sébastien Windsor. Pour uniformiser l’action, il a été décidé de choisir un nom unique : Réagir Solidarité & Accompagnement. L’objectif ? « Être plus identifiable pour que les agriculteurs aient le réflexe d’appeler à l’aide et de venir chercher cet accompagnement », a déclaré Sébastien Windsor. Chaque année, ce sont près de 4 000 agriculteurs en difficultés qui entrent dans le dispositif d’accompagnement des chambres d’agriculture.
La détection, en enjeu majeur
Le principal enjeu est de parvenir à détecter la détresse le plus tôt possible. Pour cela, chacun a un rôle à jouer. Du voisin qui constate que les volets n’ont pas été ouverts depuis quelques jours, au vétérinaire, contrôleur laitier ou toute autre personne susceptible de passer sur l’exploitation. « On a besoin d’argent bien sûr, mais aussi de présence humaine et d’empathie », a tenu à rappeler Christiane Lambert.
Via un vaste réseau de sentinelles, la MSA est aussi en première ligne pour repérer les agriculteurs en souffrance. Cela fait déjà quelques années que le régime de protection sociale agricole s’est emparé du sujet du mal-être des agriculteurs, avec la mise en place en 2011 du numéro Agri’écoute ouvert 24h/24 et 7 j/7, d’une aide au répit, ou encore de cellules pluridisciplinaires de prévention.
S’accorder des temps de repos
La notion de repos occupe une place importante dans le rapport d’Olivier Damaisin sur le mal-être des agriculteurs. Le député s’étonne encore que des agriculteurs proches de la retraite rencontrés dans le cadre de son enquête lui aient confié n’avoir jamais pris de vacances. Certes, les choses évoluent avec les nouvelles générations d’agriculteurs qui ont d’autres aspirations. Luc Smessaert, vice-président de la Fnsea, a toutefois rappelé l’importance d’inciter les agriculteurs à prendre des congés, par exemple « en améliorant le crédit d’impôt sur les dépenses engagées pour leur remplacement pendant leurs congés ».
Pour conclure cette conférence de presse, Samuel Vandaele, président des Jeunes Agriculteurs, a estimé que si « nous devons assumer qu’il y a un mal-être dans la profession agricole », il faut aussi « faire attention aux raccourcis ». « Un certain nombre de suicides dans l’agriculture sont liés au métier, mais ce n’est pas l’unique raison » a-t-il spécifié. Dans le rapport d’Olivier Damaisin, il est d’ailleurs indiqué que 58 % des 1 600 appels au numéro Agri’écoute durant la période allant de juin à septembre 2018 étaient relatifs à des difficultés personnelles. N’oublions pas que les agriculteurs sont comme tout le monde. En plus d’exercer une profession particulièrement exigeante et qui mériterait d’être revalorisée notamment via une rémunération digne, ils peuvent aussi rencontrer des problèmes d’ordre personnel.