Pépins de raisin + poules = duo gagnant?
Des chercheurs de l’Inrae ont montré les bénéfices importants sur la santé des poules apportés par des extraits de pépins de raisin. Ils sont associés à un changement de composition de la flore intestinale des volailles.
Depuis une dizaine d’années, le microbiote humain (la communauté de « microbes amis » que nous hébergeons dans notre tube digestif) est devenu une star scientifique et médiatique. De très nombreux articles et livres (« Le Charme Discret de l’Intestin » étant le best-seller plus connu), s’appuyant sur des milliers d’articles scientifiques, sont venus documenter que notre tube digestif contient des légions de bactéries qui nous aident à remplir nos fonctions vitales. Et il ne s’agit pas que d’optimiser notre digestion : ces bactéries améliorent (ou détériorent si elles sont remplacées par d’autres) notre immunité, notre humeur et notre sociabilité, notre vieillissement, le développement de notre système nerveux, et quantité d’autres aspects.
La nouveauté est que la santé animale, bien moins dotée financièrement que la santé humaine, est en train elle aussi de s’emparer de ce domaine, et produit désormais des résultats scientifiques dont on espère qu’ils déboucheront sur d’efficaces probiotiques (produit contenant des microbes) ou prébiotiques (produits favorisant certains microbes) pour les animaux. Car, à l’instar du spécialiste suédois Sven Pettersson, beaucoup de chercheurs reconnaissent que « l’univers des probiotiques et prébiotiques repose encore trop souvent sur une science peu rigoureuse, et nous avons besoin de davantage d’études solides ».
La santé animale s'intéresse à son tour aux effets du microbiote
C’est une série de telles études que l’Inrae a menée récemment (en collaboration avec des chercheurs britanniques), documentant des effets bénéfiques impressionnants sur la santé des poules d’extraits de pépins de raisin. Pourquoi les pépins de raisin ? D’abord parce qu’il s’agit d’un sous-produit bon marché et abondant de la viticulture ainsi que de la production de jus. Mais surtout parce que scientifiquement, les flavonoïdes et composés phénoliques qu’ils contiennent se sont déjà fait remarquer par des effets bénéfiques sur le risque cardiovasculaire, la santé osseuse, et plus globalement l’état général de différents animaux.
Les chercheurs ont donc pensé que ces extraits pourraient agir sur un problème désormais préoccupant dans la production de volaille, à savoir les troubles multiples (cardiologiques, métaboliques…), et notamment la détérioration de la fertilité, qui ont résulté de l’accroissement de la vitesse de croissance des animaux (le principal critère de sélection jusqu’à présent).
Un bénéfice spectaculaire... et transgénérationnel
Le résultat, avec seulement 1 % d’extrait rajouté à l’alimentation des animaux, a été spectaculaire. Testé sur 324 poules reproductrices durant 40 semaines, le traitement a amélioré la qualité des œufs (solidité et composition), et surtout a amélioré la vitesse de croissance et la viabilité des poussins, un bénéfice transgénérationnel totalement inattendu !
À travers une étude plus poussée faite sur seulement 36 poules, les chercheurs ont montré que ces bénéfices résulteraient de changements dans le microbiote. Ils ont en particulier noté une augmentation des effectifs de trois groupes de bactéries, les Bifidobactéries, les Lactobacilles et les Lachnospiracées. Ces bactéries semblent favorisées par les extraits de pépins de raisin. Ce qui fait de ces microbes de bons candidats pour des probiotiques à l’avenir. Un des bénéfices notables était la réduction de la quantité de graisse accumulée chez ces poules qui sont habituellement atteintes d’obésité. Un résultat cohérent avec des observations sur les souris, qui montrent que le microbiote peut induire l’obésité s’il est déséquilibré, ou au contraire la réduire s’il est sain. Et qui sait si ce résultat obtenu en santé animale ne pourra pas, à son tour, être utile en santé humaine ?