Convention Canne 2023-2027 : victoire et soulagement pour les planteurs réunionnais
Le 13 juillet dernier restera dans les mémoires des quelque 2 500 planteurs de l’île de la Réunion qui ont bénéficié d’un élan de solidarité générale permettant de voir aboutir leurs revendications dans la nouvelle convention canne 2023-2027.
Les négociations avec l’industriel sucrier Tereos, qui détient le monopole sur l’île, ont été ardues, mais les planteurs n’ont rien lâché et ont pu compter sur le soutien de l’État. C’est la survie de toute la filière, sur le déclin, qui se jouait dans cette nouvelle convention canne 2023-2027. Guillaume Sellier, président des Jeunes Agriculteurs Réunion et producteur de canne à sucre à Saint-Benoît, répond aux questions du JA Mag sur ce que l’on peut considérer comme « une convention historique ».
Dans quel climat se sont déroulées les négociations ?
C’était très compliqué, comme à chaque convention. Heureusement, cette fois-ci, nous avons eu un préfet (Jacques Billant, ndlr) à l’écoute, qui a su comprendre les revendications des planteurs et arbitrer les débats en remettant l’entreprise Tereos à sa place quand il le fallait. L’État dans son ensemble a été d’un grand soutien, en accordant aux planteurs une aide complémentaire de 14 millions d’euros par an. Par ailleurs, c’est la première fois que l’on sort du cadre de la convention tripartite entre les planteurs, Tereos et l’État. L’industriel énergétique Albioma, les distilleries, mais aussi les collectivités territoriales, à savoir les conseils départemental et régional, ont également été conviés aux négociations et ont chacun apporté leur petite contribution aux planteurs et uniquement à eux. L’ensemble des acteurs semble avoir compris l’importance de cette convention pour relancer la production de la canne à sucre sur l’île.
Concrètement, quelles victoires avez-vous obtenues ?
En mettant toutes les aides bout à bout, les planteurs vont obtenir entre 14,5 et 20 euros supplémentaires par tonne de canne à sucre. Alors que le prix de la tonne de canne à sucre était situé entre 70 et 80 euros dans la précédente convention, on l’estime désormais autour de 100 euros. Le prix de base, lui, n’a pas bougé. Il est toujours de 40,07 €/tonne pour une richesse en sucre de 13,8 %.
Cette nouvelle convention défend aussi une répartition plus équilibrée des bénéfices entre l’industriel sucrier et les planteurs. Au-delà d’un certain seuil de bénéfice, l’entreprise Tereos devra désormais partager la somme excédentaire avec les planteurs (au-delà de 13,5 millions de bénéfice : 1/3 pour les planteurs, 2/3 pour l’industriel ; au-delà de 17 millions d’euros : 50/50, ndlr).
Qu’en est-il de la revalorisation de la prime bagasse ?
La bagasse (résidu fibreux issu du broyage de la canne à sucre, ndlr) est une biomasse utilisée par Albioma pour produire de l’énergie sur l’île de la Réunion. Jusqu’à présent elle était considérée comme un déchet et payé comme tel. Nous, les planteurs, considérions qu’elle avait bien plus de valeur qu’un déchet et que son prix devait être revalorisé. L’État nous a entendus et a rajouté jusqu’à trois euros supplémentaires par tonne de canne à sucre en fonction du taux de fibre. De son côté, Albioma a aussi décidé de contribuer à la revalorisation de cette bagasse.
Pouvez-vous nous en dire plus sur le dispositif exceptionnel d’appui aux planteurs sur la « coupe longue machine » ?
C’était aussi une forte revendication des planteurs qui, face à une pénurie de main-d’œuvre, ont dû adapter leur mode de coupe notamment dans les terrains difficiles d’accès, en concevant des têtes de coupe adaptables sur mini-pelle. La conséquence de ce type de coupe, de plus en plus courante sur l’île, est une plus grande proportion de paille et de résidus, ce qui avait tendance à pénaliser les planteurs. Il n’était pas rare qu’en fin de campagne, certains doivent rembourser l’industriel. C’était complètement aberrant et il fallait trouver une solution. C’est un sujet assez technique, mais ce que je peux dire c’est que des compromis ont été trouvés dans cette convention.